Ambedkar : Première page du manuscrit de la Constitution de la République indienne, entrée en vigueur le 26 janvier 1950. ¢ WIKIMEDIA COMMONS
Le 14 avril, l’Inde a fêté « Ambedkar Jayanti », l’anniversaire de Bhimrao Ramji Ambedkar, né en 1891. Moins connu que Gandhi ou Nehru, il occupe une place majeure dans l’Inde contemporaine. Un sondage de 2012 le désignait « greatest Indian » de l’Inde indépendante.
Il fut, à la fois, le grand juriste qui rédigea la constitution de l’Inde et le porte-parole des intouchables. Il est le premier d’entre eux à avoir fait des études supérieures, à l’université de Columbia et à Londres. De retour en Inde, il se lance dans une lutte contre les discriminations dont sont victimes ceux qui s’appelleront bientôt Dalits, un mot marathi qui veut dire écrasé. Car écrasés, méprisés, ils le sont par la société qui les considère comme impurs. Ambedkar multiplie les actions non-violentes pour affirmer le droit des « intouchables » à entrer dans les temples et à tirer de l’eau des puits traditionnellement réservés aux castes dites « supérieures ». Il s’oppose à Gandhi qui défend l’ordre des castes. Il réclame leur abolition dans un pamphlet radical « Annihilation of Cast ».
A la fin de sa vie, il n’attend plus rien de l’hindouisme et se convertit au bouddhisme.
Ambedkar reste mal connu en France. Des centaines de livres ont été consacrés à Gandhi, un seul à ce grand homme (Dr Ambedkar, leader intouchable et père de la Constitution indienne par Christophe Jaffrelot, Presses de Sciences Po).
Aujourd’hui, alors que s’éloigne le souvenir de Gandhi qui n’est plus qu’une image pieuse, celui d’Ambedkar n’a rien perdu de son acuité et de sa pertinence, son nom est présent dans tous les combats des Dalits. Car contrairement à ce qu’on croit, et ce que ne veulent pas voir les Indiens « de caste », peu de choses ont changé pour ceux des villages et des petites villes.
Les discriminations (qui concernent près de 300 millions d’êtres humains), les humiliations, sont quotidiennes: les viols, les meurtres, ce qu’on appelle en Inde les « atrocities » (actes de barbarie), sont fréquents. Un jeune fermier Dalit battu à mort, pour avoir possédé et monté un cheval, une famille Dalit de quatre personnes, dont deux enfants, incendiée à l'intérieur de leur maison par des membres de la communauté Rajput etc…
Pour en savoir plus, visitez le site internet du journal The Mooknayak (1) qui documente, semaine après semaine, l’actualité des intouchables et des basses castes.
Didier Sandman*
(1) The Mooknayak (l’homme sans voix) est le nom d’une publication qu’Ambedkar avait lui-même créée.
Après avoir parcouru l’Inde pendant 50 ans (plus de 70 voyages!) et fondé l’agence de voyages la Route des Indes, Didier Sandman est indophile mais pas « indolâtre ». Il ne peut rester indifférent à la question Dalit et voudrait qu’elle soit mieux connue.